P a r c e l l e 1 1 2



SUBLIME(S)

2023/24

 ON NE NAIT PAS MERE

Toutes les mères sont insuffisamment bonnes. Je le sais, je suis mère. On connait le déni de grossesse, il existe aussi je pense quand l'enfant est là, le déni d'être mère. Je parle de ces zones troubles où la mère, avant d'être mère est une femme, où avant encore d'être femme elle fût fille de sa propre mère et de son père. Il y a dans ces filiations des liens confus qui parlent d'amour et de violence, toute l'histoire de l'humanité en témoigne.

Il ne s'agit pas ici de refaire le procès de Julie Jeanne L., la Justice s'en est chargé, elle a purgé sa peine. Mais comme elle l'écrit elle-même : « ma peine ce n'est pas celle prononcée par les juges. Ma peine elle est à moi, lourde, intime, de la tristesse et de la culpabilité qui ne me quitteront jamais ».

Cette pièce est une enquête qui plonge dans l'histoire intime de deux personnages frappées par un drame. Les deux femmes dont il est ici question se sont rencontrées en prison, la parole que l'une est venue chercher derrière les barreaux va se déployer sur scène et révéler en miroir l'ombre d'une autre histoire restée sans explication. Les deux récits parlent d'abandon et chacune porte le deuil d'un mort auxquels la pièce va rendre hommage.

Ecriture, conception et mise en scène - Vanessa Larré




L A P A S S E

2019/21


                                                  À CORPS PERDUS                                                   

La Passe est un miroir tendu à celles et ceux qui font travail de leur corps et qui questionnent le désir. C'est aussi l'idée que dans nos sociétés l'assignation de la mise à disposition du corps des femmes est inscrite dans notre culture et se transmet de génération en génération. Au fur et à mesure des portraits qui rythment le spectacle où l'image tient au début les rennes de la représentation, un autre langage naît et la pièce transcende finalement son sujet.

La pièce réunit sur scène trois générations de femmes dont deux comédiennes et une prostituée. Leurs récits retranscrivent les fragments des histoires intimes qui les hantent. Chaque portrait témoigne d'une blessure qui dépasse la question féminine, ils sont comme des fils qui tissent des liens reliant l'histoire individuelle de chacun au canevas de l'Histoire universelle où la condition des sexes s'écrit depuis des millénaires.

C'est un texte écrit à partir des témoignages des interprètes et de ceux d'hommes et de femmes rencontrés durant les deux ans d'enquête initialement centrée sur la prostitution qui a abouti à cette proposition théâtrale singulière. La mise en scène tend des passerelles entre différents médiums allant de l'image vidéo à l'installation plastique, en passant par la présence scénique et la parole des trois interprètes.

Au-delà de sexe tarifé et de condition féminine il est question ici de matrice et d'enfance. Le spectateur est invité à entrer par les coulisses, directement au cœur de la maison où les chambres, cloisons et couloirs relayent les entrailles qui nous portaient jadis. Mémoire des sons qui nous parvenaient à travers la peau, timbre assourdi des voix, des étreintes, des éclats de colère et de rires qui ponctuent ce temps d'avant la rencontre solitaire avec le monde.

Plongé dans un voyage sous la peau, vers l'inconscient et les origines, le public est interpelé dans sa propre intimité par les paroles bien réelles que les personnages livrent avec dignité et sans fard.

L'ENVERS DU DECOR

La question du déplacement des spectateurs est au cœur de ma réflexion et les différents dispositifs scéniques que j'élabore le mettent en situation. Le spectateur se trouve physiquement à une autre place que celle qu'il occupe traditionnellement au théâtre, soit par la proximité, soit par l'immersion, soit pour La Passe par la déambulation. Il s'agit de définir le plateau comme lieu qui met en scène le rapport entre spectateurs et interprètes où il est question de l'expérience du trouble lié à cette intimité et de sa représentation.

Le plateau figure ces couloirs et chambres désarticulées à l'arrière du plateau puis sur le devant de la scène. Les comédiennes, présentent dès le début du spectacle dans le couloir d'accès au plateau, habitent de petites loges exposées aux regards du public, qui représente cet espace intime qui est aussi leur espace de travail. Elles sont directement placées à cet endroit de « mise à nu », tout en étant clairement en situation de travail puisqu'elles lisent des témoignages recueilli auprès de clients de la prostitution au début de l'enquête qui a initié La Passe, diffusés en direct sur scène au début du spectacle qui est le sas d'entrée du public qui agit comme un prologue.

Une fois de l'autre côté, les spectateurs qui ont traversés le plateau pour venir prendre place dans la salle, se retrouvent face à trois écrans où sont projetées des images de rues la nuit où les silhouettes d'hommes et de femmes se croisent, se cherchent sur les paroles désincarnées de clients lues en direct par les comédiennes. Ces images vont rapidement faire place à trois portraits filmés qui vont se succéder et où on reconnaîtra les actrices croisées à l'arrière du plateau.

Leurs récits témoignent de transgression et du courage qu'il faut pour « gagner sa vie », cette expression qui parle au-delà de l'argent et du travail des moyens que chacun devra conquérir pour se rencontrer individuellement et prendre sa place dans le monde.

Ecriture, conception et mise en scène - Vanessa Larré



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